29.9.10

Esprit d'airain, couilles d'acier

Sam O'Nihil rides again!


Octobre 1970 - L'histoire d'une petite histoire
Comment la police antiterroriste a épié la captivité de Pierre Laporte

Louis Hamelin
29 septembre 2010

Le matin du 19 octobre 1970, tandis que policiers et experts fouillent les tas d'objets et de détritus extraits de la maison du 5630, rue Armstrong, le repaire de la cellule Chénier découvert aux petites heures ce jour-là, un sergent de la Sûreté du Québec, s'adressant aux journalistes accourus, évoque certains indices (taches de sang, etc.) relevés dans le bungalow perquisitionné et qui tendraient à prouver que le ministre du Travail a bel et bien été détenu, puis assassiné à cet endroit.

La suite de sa déclaration a été occultée par l'enchaînement rapide des événements de cette semaine-là. Mais comme l'écrirait le lendemain le reporter du Montréal-Matin: «D'après les renseignements recueillis par les policiers au cours de la matinée d'hier, une seconde maison installée sur le terrain adjacent aurait également servi de repaire à des membres bien connus du Front de libération du Québec.» Cette information fut aussi publiée par le Montreal-Star (dès le 19 octobre, le Star étant un journal de l'après-midi), Le Petit Journal (un hebdomadaire) du 25 octobre, Le Soleil de Québec, qui s'appuyait sur une dépêche de la Presse canadienne, et le Nouvelliste de Trois-Rivières, repiquant probablement, sans la citer, la même dépêche.

Outre son contenu, intrigant à première vue, sinon même explosif dans le contexte de l'affaire Laporte, c'est le sort de cette information qui retint presque aussitôt mon attention: dans les jours suivants, elle s'évaporait sans laisser de trace. On n'en entendrait plus jamais parler: ni à l'enquête du coroner, ni au cours des procès-spectacles à venir, ni même à la faveur d'une des grandes enquêtes journalistiques (Toronto Star, CBC) des années 1970. Plus tard, en parlant à d'anciens membres de la bande qui avait fréquenté le 5630 de la rue Armstrong au cours de l'été 1970, et en les écoutant me réfuter, dans les termes les plus nets et assurés, la présence de felquistes dans la maison voisine, soit au 5640 (il n'y a pas de 5620, un terrain vague s'étendant, à l'époque, sur deux lots dans cette direction), je me suis vite convaincu de la fausseté de ladite information de source policière.

Des détails qui clochent

Il fallait donc conclure à une erreur: interrogés par les agents, les habitants du voisinage avaient confondu les occupants de l'autre bungalow, situé au 5640, avec les suspects dont on leur exhibait les photos. Sauf qu'un détail clochait. Deux, même. Examinons la suite de la déclaration policière du 19 octobre: «Toutefois, cette maison était déserte depuis un mois.» (Presse canadienne) Et «[...] mais peu de temps avant la découverte du corps de M. Laporte, une familiale venait se garer devant la porte et ses occupants vidaient la maison de tout son contenu» (Montréal-Matin).

Cette erreur de la police comportait donc, assez étrangement, deux points de recoupement avec la trame connue des événements d'octobre. Un mois plus tôt, c'est en effet, à quelques jours près, le moment du départ de trois membres de la cellule Chénier pour leur fameux voyage au Texas. Il faut croire que, par le plus grand des hasards, les voisins ont décidé de décamper presque en même temps. Et que, hasard encore plus incroyable, peu après (Le Petit Journal précise: vers les 6h) la mort d'un otage politique dans la maison voisine, événement dont ils ne pouvaient en principe se douter, ces mêmes voisins revenaient vider les lieux!

Une chose de sûre: les membres de la cellule Chénier, eux, n'ont pas eu besoin d'une station wagon pour transporter leurs affaires, il n'y a qu'à voir, sur les photos, le capharnaüm abandonné dans leur sillage! Pour des policiers venus faire du camping dans la banlieue profonde, par contre, le format familial pourrait avoir été bien utile, entre autres pour trimballer un délicat matériel de surveillance électronique. Car la «petite histoire» racontée aux journalistes pendant la matinée du 19 octobre est une fabrication évidente, une tentative limpide de déguiser l'identité des véritables occupants du bungalow voisin. Le 5640 était un des postes d'observation de la police antiterroriste pendant la semaine fatidique. Il pourrait ne pas avoir été le seul. Le Petit Journal a aussi parlé d'une «troisième maison qui a joué un rôle dans cette affaire. Située à 75 pieds des autres domiciles et de l'autre côté de la rue, elle était ou, du moins, semblait abandonnée depuis un mois et demi». Ce qui nous amène approximativement au début de septembre et à la célèbre réunion de planification stratégique du FLQ dont le bungalow de la rue Armstrong a été le théâtre...

Une histoire sur mesure

Cinq journaux, je le répète, ont rapporté la partie de la déclaration policière qui concernait la maison voisine, ses occupants envolés et la visite éclair d'une auto familiale. Quelques autres ne l'ont pas fait: The Gazette et Le Devoir, lesquels, ce matin-là, n'avaient de toute évidence aucun reporter sur les lieux. Ensuite La Presse et Le Journal de Montréal. Dans ce dernier cas, la chose est assez compréhensible, même si Pierre Bouchard, qui couvrait les activités du FLQ pour le populaire tabloïd, se trouvait bel et bien rue Armstrong avec les autres. Je cite l'Histoire d'un mouvement clandestin de Louis Fournier: «Selon la commission d'enquête Keable, "M. Bouchard a collaboré avec divers services de renseignements antisubversifs pendant une période qui s'étend au moins de 1969 à 1973". Il aurait collaboré avec les services de renseignement de l'armée canadienne [il est officier de réserve], de la GRC et de la police de Montréal...»

Autrement dit, Bouchard savait à quoi s'en tenir au sujet de la maison voisine. Le fait qu'il n'ait pas jugé utile de répandre cette fabrication nous renseigne par ailleurs un peu mieux sur la véritable fonction de la petite histoire inventée par la police antiterroriste: elle n'est pas destinée aux lecteurs, à la population; seulement aux journalistes eux-mêmes, c'est-à-dire à ceux qu'elle ne contrôle pas et qui risquaient, ne sait-on jamais, de rendre compte de certains mouvements suspects observés par les habitants de la petite rue Armstrong en septembre et octobre 1970.

Attribuer ces mouvements au FLQ était la meilleure manière de détourner et de désamorcer toute question possiblement embêtante sur de tels va-et-vient.

Un bout de jupon

Les récents reportages diffusés par Radio-Canada ont confirmé que l'escouade antiterroriste connaissait tous les felquistes et a continué de les surveiller même après les enlèvements. La Presse canadienne l'affirmait déjà, le 6 octobre 1970: «Tous les membres connus des organisations terroristes séparatistes sont actuellement étroitement surveillés depuis l'enlèvement hier du diplomate Richard Cross...» Qu'ont donc fait les gens de la CAT, l'escouade antiterroriste combinée, rue Armstrong, au cours de l'automne? La même chose qu'à Prévost, en juin, lors du démantèlement d'un premier complot d'enlèvement. Et la même chose que dans la rue des Récollets, plus tard, à Montréal-Nord: ils ont installé des postes d'observation autour des repaires qu'ils avaient repérés.

La preuve est dans le cover-up. En effet, il est plutôt rare qu'on essaie de camoufler un crime inexistant. Et dans la petite histoire de la maison voisine, la tentative de camouflage, même si elle ne tient qu'en quelques phrases, crève les yeux. La police antiterroriste a commis une erreur et laissé dépasser un bout de jupon. Et s'il est raisonnable de penser qu'on a profité du voyage étasunien des locataires du 5630 pour sortir la quincaillerie électronique, alors l'escouade antiterroriste a littéralement «monitoré» la captivité de Pierre Laporte. Ce qui soulève évidemment bien des questions sur une telle descente de police qui, de justesse, s'est apparemment trompée de cible cette semaine-là.

Qui donc occupait la maison voisine du bungalow des ravisseurs de Laporte entre le 10 et le 17 octobre de l'automne 1970? Je propose que Radio-Canada aille le demander à son ripou préféré, Julien Giguère, le père spirituel autoproclamé de la Loi sur les mesures de guerre.

27.9.10

Mes actions de Segway en chute libre!




Juste quand j'allais proposer mon slogan (Segway: on marche pas!) à Jimi Heselden...

Vais devoir convertir mon bolide en tondeuse à gazon.

26.9.10

Triathlon tribal

Enfin! Voici venu le temps de mettre un terme à l'embargo, de clore le motus et découdre nos bouches!

Figurez-vous donc que le samedi 9 octobre sera un de ces jours ancrés dans nos mémoires, un de ces samedis qui impriment un vif souvenir au corps même si on s'est cuité à mort...

D'abord, la terre d'Amérique, et plus précisément nous, va recevoir la première visite de Blue! I kid you not: c'est officiel, son billet est acheté, elle vient faire une saucette, trois jours et des poussières. Ce sera serré, va falloir bourrer l'agenda jusque dans les marges et en mener large! Toute la Tribu est invitée à venir la rencontrer à partir de 18 heures au Café-Resto Bar L'absynthe. Blog & Roll!

À vingt heures, ça continue avec le lancement des Corpuscules de Krause, de notre Sandra Gordon. Au même endroit. Gênez-vous pas!

Enfin, à vingt-deux heures, toujours à L'absynthe et afin de clore en beauté, un show de Masataq, dont j'ai parlé ici tout récemment.

Un samedi, je vous dis, du feu de Dieu!

image: © fakirdesign

17.9.10

Cool court

Blue et Laure K ont concocté un court cool à partir d'un de mes textes dans Papier Mâché. Quand la forme épouse le fond...

12.9.10

De la musique qui tient aux côtes (d'azur)

J'ai soupé hier avec un gars pas ordinaire. Rencontré au récent lancement des Corpuscules de Krause (l'opus de notre Sandra Gordon qu'Emcée vient juste de terminer dans l'allégresse mêlée d'enchantement), Frédéric Mas est venu au Moonshine avec sa blonde mangeailler mes sushis. Parce que je fais des sushis, astheure; ça change des bines et du pâté chinois, mais anyway, toujours est-il que ce very nice Niçois arrivé ici en 2001 m'a fait une forte impression: un charisme, un estomac, une carrure, un regard, une intelligence, une voix! À force de fréquenter Blue, j'en oubliais que tous les Français fantastiques n'originent pas du Nord.

Sa blonde avait apporté un cheesecake, lui a fourni la galette, celle de Masataq: j'écoute en boucle depuis ce matin et ça me renverse en diable...

7.9.10

Imposture compost

Je ne cherche pas, je trouve.

Dixit Mistral...

Hohoho!

Picasso: “les bons artistes copient, les grands artistes volent”.

Tuladit Pablito.

1.9.10

Grande visite



Me lève tout juste. Déjeûné au blé d'Inde. Y a un fond de pastis dans un verre à gargarisme en plastique jaune qui me fait de l'oeil...

Hier soir, au Moonshine ainsi qu'on a baptisé son appartement, Emcée et moi avons reçu la visite de nulle autre que la mère Sandra Gordon en personne, ayant traversé vents et marées de la ville pour m'apporter en primeur amicale ses corpuscules de Krause tout frais sortis de l'imprimerie, et en prime une bouteille de Pernod, une autre de pinard. Elle vient d'ailleurs de m'écrire à l'instant qu'elle est pas allée bosser ce matin, héhé...

J'ai lu le prologue à voix haute et ça roulait entre la langue et le palais comme un alcool gouleyant; ensuite, on s'est serrés très fort dans nos bras au milieu de la cuisine.

13.8.10

Vigneau, numéro VI

Ce cher Kevin sort du parc de La Fontaine et nous concocte une fable entièrement de son cru en résonnances acadiennes que je m'empresse avec une joie immense de partager avec vous.

Le Bouseux du Village
« Fable fausse ficelée sur un fidèle fait divers »
Kevin Vigneau



Y’avait un bouseux dans la place
Qu’on nommions le Havre-Aubert,
Tellement perdu que jamais sache,
Où c’est qu’étions rendue sa mère ;
Même si cachée à côté de lui
A lui ramonait les oreilles,
Poussant un wak :« Fau’que tu t’essuies
De la tête jusqu’aux orteils,
Pis surtout pas en oubliant
D’où vers dehors vient le dedans ».

Tout son travail, c’était la terre,
Y avait jamais su pêcher,
Pour lui la mer, c’était misère,
Y pourrions jamais que bêcher.
Y’avait deux moutons et trois poules
Trois quatre herbages à récolter
Pi’le bord d’la plage et pis les houles
Assis sul cul à radoter.

Toujours crotté dans sa grand peur
De voir la marée qui s’approche
Jamais à cause de son odeur
De créature vira tout croche.
Après le chiendent et les fumiers,
Prenait sa pause dans l’étable,
Plutôt qu’au large sous les huniers
Avec l’espoir d’action notable
Où’l vent l’aurait pt’être parfumé.

Après une coupe de s’maines de même
Pis une décade et des années
À virer blanc à virer blême
Toutes les familles s’en viennent tannées,
C’est que ça jase au Havre-Aubert
Quand un jeune veille aux écuries.
Les nonnes, l’abbé, c’est la curie,
Faut qu’on l’évade, ce pauv’ Norbert,
Ça c’est son nom, j’lavais pas dit.

Fa’que v’la t’y pas que vient son père,
Voir son enfant dans bergerie
Foutant semence dans cul pubère
De la plus jeune des brebis.
« Qu’est-ce tu fais-là, toi mon engeance ! »
Qu’eule Vieux d’un Rien de peur s’écrie,
« Je cherche une pelle dans la dépense
Pour désharber les pissenlits »
« Tu cherches une pelle, toi mon étron,
Dans le fond du cul de ma brebis,
Savais-tu pas que la dépense,
Est à côté de l’établi ».


À tout village qui demande
Une grande et vierge pamoison
Faudrions bien qu’il se commande
À lui-même avant la moisson.

12.8.10

Et de cinq!

MakesmewonderHum se manifeste à son tour, en grande forme, avec L'Oure pis les deux gâ...

Comme elle est réjouissante, cette avalanche!

© 2010 Michel Plamondon

Au tour du Plumitif de nous régaler d'une affabulation joualisée! Riches, les rimes. L'oeuvre est .

Ça fait quatre: Blue doit rougir de plaisir...

10.8.10

deul beurrer ben d'aplomb pour l'avouère

Notre cher tribal Terrible, Yvan dit Lafontaine, s'est fendu d'une fable juteuse en joual traduite d'un obscur patois qui s'appelle, je crois, le français.

Je l'ai beurré ben d'aplomb pour l'avouère, mais je l'ai eu, pour notre plus grand bonheur et notre édification. Who's next? Que deviennent Lady Guy, OldCola, MaxCat et PatLag et Johnny Bee et Réjean Ducharme et Anne Archet et Big Mac et Butch et tous vous autres tristes Tribaux fainéants de l'accent?

5.8.10

La Gornouille qui veut forcir autant que l’Beu

Voici, à la faveur d'une insomnie, ma réponse au joli défi que m'a lancé Blue. J'ai respecté la stucture de la fable originale.

La Gornouille qui veut forcir autant que l’Beu

Fa qu’une fouais c’t’une gornouille : a spote in Beu,
Ène méchante amanchure de steak, toé!
Elle, qui pèse pas ben plusse qu’une mouche à feu,
Tu suite est jalouse pis a s’ma engraisser
Pou v’nir au moins aussi toutoune.
A dit à sa seu : «R’gâr ben au lieu d’fé la baboune!
C’tu correct, là? J’ai-t-y assez grossi?
-Ben non. –Pis là? –Pantoute.
Pis de même? Chtu grassette?
Jamais dans cent ans.»
La tite niaiseuse de ouaouaronne, esti,
A s’gonf tell’ment qu’a pète au frette!

Dans l’monde c’est plein de caves pareils,
De p’tits trous d’cul qui veulent êt’le grand boss,
Le chien d’poche envie au Danois son os
Pis l’maringouin s’prend pour une abeille.

2.8.10

Cadeau de biloute




Blue, notre Ch'ti résidente, m'a fait parvenir il y a quelques mois une perle dont je n'ai pas eu jusqu'ici l'occasion de parler. Il s'agit d'un bouquin de fables en ch'ti, pur patois picard du nord, étrangement intitulé Fablenchti (Auteur: Jo Tanghe, Éditions GabriAndre).

En voici un extrait, traduction d'un morceau de Jean de La Fontaine, dont je vous laisse le soin de reconnaître l'original...

Eul’ guernoule qui voulot éte aussi grosse qu’eul bœuf

Un jour ein’ biell’ guernoule qu’y’ étot sortie d’l’étang
Pou s’cauffer au solel aperçot un géant.
Ch’étot un bœuf qui v’not à l’mare pour boir’ un d’mi.
A vir ein’ si gross’ biêt’ eul’ guernoul’ fut saisie.
Elle se dit in ell’ même « j’ai invie d’essayer
Eud fair’ grossir min vint’ afin d’li arsembler »
Et l’v’la qui comminche à faire infler sin corps
In d’mindant à s’petite sœur « j’y sus point incor ? »
Eh bé non. – Et à ch’t’heure ? – Te n’ n’est lon. – Bon, et là ?
- T’as bieau fair’ euj sus sûr que t’y arriv’ras pas.
- Eh bin ch’est ch’qu’on va vir ». Mais à forc’ eud gonfler
Ses boyaux dins sin vint’ ont fini par péter.
Ch’est triste mais au fond, in busillant bin
Dins la vie ch’est parel. Et y a toudis des gins
Qui n’ont jamais assez, et te vos des machons
Qui voudrottent rouler dins l’autio d’leur patron.

31.7.10

Johnny B's back in business

Sa plume dérouille, bordel, comme il y a vingt ans, et je jouis à le relire dans un journal (cybernétique rien de moins: on n'aurait pas cru se rendre là, autrefois!).

Un commentaire sous forme de question?

Quand on n'est pas responsable et qu'on coûte cher à gérer anyway, héhé...

Ça fait pitié, pareil. Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, comme chante l'autre: je vous parle de quand j'estimais Richard.

Imputable, indeed.